Alerte ! Alerte ! On va parler élections et politique italienne ! MAIS rassurez-vous les amis, ça va être frais comme un premier mars !
Il ne vous aura sans doute pas échappé que l’Italie va voter ce week-end. Dimanche 4 mars pour être précis. Si tel est le cas… mà dove vivete ?! À chaque fois que j’écoute France Inter je tombe sur un reportage à ce sujet. Quant à nous, les expats en Italie, forcément, on est en plein dedans, prospectus à l’appui.
Si la politique me passionne de manière générale, je vous avoue qu’il m’a fallu un peu de temps pour me mettre dans l’ambiance ! Mais aux vues des enjeux et du suspense européen généré par ces élections et en discutant avec Nico, on s’est dit qu’un petit topo ne serait pas de trop. D’emblée je vous le dis, c’est un article écrit à 4 mains (j’allais dire deux mais du coup, ça n’avait plus le même sens). Merci Nico pour ton éclairage sur certains points qui défient ma logique !
Attention article très accessible (comme le suggère le titre). Nous allons tenter de vous expliquer avec des mots simples (basique, pardon c’est Orelsan qui me hante !), ces élections. Qui sont les différents candidats ? Quel est le mode de scrutin ? Quels sont les enjeux ? Andiamo !
Elections italiennes : les différents partis et leurs candidats
Parce que parfois, les images valent mieux que les mots, on vous propose une petite infographie home made pour vous familiariser avec les protagonistes ! Notons qu’il n’est plus possible d’effectuer des sondages 15 jours avant les élections et que la plupart des italiens ne savent pas encore pour qui voter. Donc les chiffres valent ce qu’ils valent quoi.
Silvio Berlusconi, le retour du cavaliere de Forza Italia
Vous aurez sans doute entendu l’excitation autour du retour annoncé du cavaliere, sur le devant de la scène. Attention cependant à ne pas se faire avoir ! Silvio Berlusconi est inéligible ! Il a en effet été condamné pour fraude fiscale en 2013.
Il dirige donc ici simplement la campagne en utilisant les médias à bon escient (être proprio de l’équivalent italien de Canal+, ça aide ? meuh non… qu’en pense Bolloré?). En tout cas, ça porte ses fruits. Les intentions de vote pour Forza Italia ont augmenté. Mais, le scrutin étant en partie majoritaire (promis, on y revient un peu plus loin), Silvio ne saurait gagner tout seul. C’est pourquoi il doit former une coalition avec des gens, ma foi, peu recommandables.
Une coallition douteuse avec la Ligue du Nord
Forza Italia n’étant crédité que de 17% d’intention de vote, « papi popol » (pour politique hein, aucune allusion à son goût prononcé pour les « jeunes » filles dévêtues), est allé chercher de l’aide auprès de la Ligue du Nord, le parti d’extrême droite par définition. Un mouvement nationaliste comme on les aime. Populiste, eurosceptique voire xénophobe. Ils ont tout pour eux ! Et c’est sans compter sur leur leader : Matteo Salvini. Nico dit qu’il croit entendre un bovin à chaque fois qu’il parle. Mais les italiens du nord l’adore… #SilencePesant #OuiVirguleÇaCraint
Le problème évident est la mésentente entre les deux partis. Forza Italia appartenant plus au centre droit, là où la ligue du Nord fait partie du groupe du Front National au parlement européen. Vous voyez le hic ?
Vient s’ajouter à ce savoureux cocktail le parti Fratelli d’Italia (Frères d’Italie). Rien qu’au nom, on sent bien qu’on ne va pas faire dans la dentelle. Il se dit de centre-droit mais bon… Moi je peux vous dire que je suis suédoise. Allez voir ma photo et on en reparle.
Le mouvement cinq étoiles (movimento 5 stelle ou M5S)
Entré au Parlement il y a seulement cinq ans, le mouvement cinq étoiles est la première force politique d’Italie depuis 2013.
Ce parti un peu ovni n’est ni de droite ni de gauche. Il se revendique comme étant anti-système. Créé par Beppe Grillo, un comique troupier, on sent bien qu’on met les pieds dans un drôle de bazar. Le candidat pour ces élections est Luigi di Maio. Cheveux au taquet, costume sans un pli, il est âgé de 31 ans. Bah… bah…. Bah Macron est dans la place quoi ! Hum… je crois pas non !
Leur souci, est qu’il ne veulent s’associer à personne (anti-système oblige), et la loi électorale italienne a justement été pensée pour empêcher un parti de gagner seul (à vrai dire, pour empêcher particulièrement M5S de gagner).
Ce parti est particulièrement apprécié dans le sud de l’Italie, qui a subi la crise de plein fouet. Luigi Di Maio est napolitain, ce qui évidemment est gage de confiance. #LaMafiaNousLit #MaisElleNeParlePasFrançais #Ouf #OuiLaMafiaEstUnePersonne
Démocratie directe sur internet
Tous les députés des 5 stelle se sont fait élire par internet, par le biais du portail du mouvement : Rousseau. Le site se nomme ainsi en hommage au philosophe français.
Le mouvement 5 étoiles revendique en effet la démocratie directe en lieu et place de la démocratie représentative.
Tous les militants peuvent participer sur Rousseau à l’élaboration de projets de loi ainsi qu’à la désignation des candidats. Mais au final, ce sont quand même les dirigeants qui ont le dernier mot. Si bien qu’il peuvent rayer de la carte un projet qui avait pourtant été validé par une majorité de militants. Ou encore rejeter un candidat désigné, sous des prétextes vaseux.
Pour autant, ce vent de modernité ne semble pas suffire à convaincre pleinement. Pour tous les opposants au mouvement, les membres du parti manquent cruellement d’expérience. En témoignerait la gestion de Rome et de Turin. Je ne fais que relayer ici, je n’ai absolument aucune idée de comment vont ces deux cités au quotidien.
Le parti démocrate, la gauche de Matteo Renzi
Le PD est un parti social-libéral et social-démocratique. Il est également inspiré par les idées de la démocratie chrétienne. Son positionnement européen néanmoins reste un peu difficile à définir (décidément !). Le parti a en effet longtemps refusé de s’allier au parti socialiste européen, au sein du Parlement européen. Ce n’est qu’en 2014, lorsque Matteo Renzi a été élu que le parti démocrate l’a enfin rejoint.
Pour ces élections, ils sont en mauvaise posture. La coalition qu’il mène n’a que 27, 4% d’intention de vote dont 22,9% vont au parti démocrate. Matteo Renzi est donc sur la sellette. S’ils perdent ces élections, il aura subit deux grosses défaites en 2 ans, après l’échec cuisant du référendum constitutionnel en 2016.
Le paradoxe dans l’affaire c’est que c’est bel et bien Renzi qui est clivant. Sa personnalité est jugée trop bouillonnante là où son successeur, Paolo Gentiloni, actuel premier ministre italien, jouit d’une très bonne popularité à 44%.
Des partis difficiles à départager
Comme vous avez pu le voir sur l’infographie, les 3 partis ont des pronostics serrés. Bien que la coalition Forza Italia/Ligue du Nord fasse légèrement la course en tête, le pays pourrait bel et bien se retrouver dans une impasse. Et si l’Italie devient ingouvernable… et bien Paolo Gentiloni restera à son poste encore quelques mois, jusqu’à la mise en place de nouvelles élections.
Pour ne rien arranger, le mode de scrutin est absolument… folklorique
Élections générales italiennes : quel type de scrutin ?
Comment vous dire ? Euh, vous vous souvenez de tout ce que je vous ai déjà raconté sur l’Italie ? Les chocs culturels en tout genre, les noeuds au cerveau quand on touche à l’administratif etc. Eh bien, sur ce beau modèle les italiens ce sont dit : « hey !!!!! Et si on simplifiait le mode de scrutin ! ». Mouhahahahah ! Smiley qui pleure de rire.
Depuis novembre 2017, c’est le scrutin mixte qui prévaut. Un mélange d’un scrutin majoritaire et de proportionnelle. Fait important, l’élection se déroule en un tour ! Chose quasi inconnue en France !
STOOOOOPPP ! Elle nous a vendu un truc facile et là c’est le drame !
Le scrutin majoritaire
Bon, back to basics (simple. Oui Orelsan ça marche dans les deux sens). Bref, on vote pour une personne et c’est celui qui fait le plus gros score qui est élu. Comme les délégués de classe #CestNicoQuiLaDit
Ça c’est pour la partie majoritaire. Jusqu’ici tout va bien.
La partie proportionnelle du scrutin
En complément de la personne choisie, l’électeur portera son dévolu sur une liste ou une coalition, à laquelle il donnera son vote. Dans les faits, il peut choisir une seule liste de la coalition ou toute la coalition. Dans ce cas chaque liste reçoit une partie du vote.
Si vous avez suivi jusqu’ici, bravo, brava, bravi.
Pour avoir le droit d’obtenir des sièges, il y a des seuils minimum à atteindre. On ne vous dit même pas comme on galère pour trouver toutes ces infos. Il faut vraiment aller creuser. Mais on découvre des trucs complètement improbables. Encore une fois, on se dit que ce pays est vraiment What the Fuck ! Pour rendre les choses encore plus drôles, il y a même 2% des sièges réservés aux italiens de l’étranger selon des règles à part.
Tout ce dont nous venons de parler concerne le Parlement. Mais en réalité il y a un deuxième bulletin de vote à rendre. Pour élire les sénateurs. Ce vote suit PLUS OU MOINS les mêmes règles (remerciez nous de vous épargner les détails). Par contre seuls les personnes de plus de 25 ans ont le droit de voter.
Élections générales italiennes : comment vote-t-on ?
Voilà à quoi ressemble un bulletin.
En Italie on coche ! Il faut donc soit cocher un nom (un des grands en tête de liste), soit une liste, soit les deux mais uniquement au sein d’une même coalition. Si on ne respecte par ces critères le bulletin est nul. Ça et deux trois autres choses peuvent l’annuler. Mais bon, c’est un topo pour les nuls hein, pas un cours de Sciences Politiques étrangères.
Donc pour voter, l’italien va dans son bureau entre 7h et 23h (on n’est pas près d’avoir le résultat à 20h! Pujadas si tu nous lis, on pense à toi). Et pour être vraiment sûr qu’il y aille, il y a un secret :
Le sconto à gogo ! Comprenez par là, l’art de la réduction. Figurez-vous que toutes les sociétés de transports (avion, train, bateau! ) proposent des réductions allant jusqu’à -70% sur présentation de la carte d’électeur. C’est les soldes du candidat, il est pas cher mon Berlu !
Pour conclure, malgré la complexité et les règles tordues qui peuvent prêter à rire (et encore, on ne vous a pas tout dit), cette élection est un enjeu important. Et pas seulement pour l’Italie mais aussi pour l’Europe. N’oublions pas que l’Italie est la 4ème puissance économique d’Europe et l’une des portes d’entrée principale pour les migrants en Méditerranée. L’orientation politique que prendra le pays dimanche peut largement influencer l’organisation européenne et un certain nombre de décisions pour les années à venir.
On espère vous avoir éclairé un peu sur cet évènement politique important ! Buona domenica !
Pour aller plus loin :
- Article très bien fait de la RTBF avec les différents scénarios de résultats possibles
- Chronique géopolitique d’Anthony Bellanger sur France Inter consacrée au scrutin